Gardez le paquet de chewing-gums Emile

Publié le par Ludo

L’année scolaire se termine pour moi vendredi et je dois avouer que je me réjouis à l’idée de ne plus avoir affaire avec M. T, prof des premières années (équivalent aux cinquièmes en France) de mon collège principal, surnommé la murène.

Toute l’année, toutes les semaines, il n’a eu de cesse de me faire part de son désir de dîner avec lui et un de ses anciens collègues francophiles inconnu. J’ai toujours refusé, prétextant un nombre incroyable d’excuses pour finalement jouer la carte du type ultra-occupé. A aucun moment, il ne s’est rendu compte que je fuyais cette proposition comme la peste alors que tout Japonais normalement constitué aurait eu la puce à l’oreille et n’aurait pas insisté. Mes raisons restent simples : il refoule du bec à tel point que je bénis chaque seconde passée sans lui.

Sa détermination semblait ne jamais fléchir : il voulait m’inviter à tout prix, si bien que je m’étais mis en tête qu’il ne se laverait la bouche qu’une fois que j’aurais accepté, avec le risque que sa mâchoire se décompose avant du fait de son degré avancé de décrépitude, comme un vivarium buccal laissé à l’abandon. Son palais aurait sans doute fait le bonheur d’un proctologue, ravi de passer des heures à admirer ce phénomène de la nature.

Et puis s’il m’avait convié à table, je n’aurais pu m’empêcher de lui offrir un produit pour l’haleine mais lequel ? Pris en plein dilemme, je n’aurais pu choisir entre Jexfour, Brise longue durée ou alors une bonne dose d’eau de javel. Je pensais souvent que s’il portait un slip sur la tête, il ne gagnerait pas en popularité mais au moins les gens comprendraient pourquoi il pue.

Après un an d’enquête, j’en suis venu à la conclusion suivante : une telle odeur ne peut être humaine. Ses dents ayant atteint le stade de fossiles, du moins celles qui restent, j’en déduis qu’il ne mange pas et qu’il doit laisser les aliments pourrir dans sa bouche, ce qui expliquerait les agglomérats verts, marrons et jaunes sur les gencives grises et les chicots ocres.

En parallèle, il déborde d’énergie. Je n’y vois qu’une seule explication plausible : M. T n’est autre qu’une créature immortelle. Son manque de propreté l’exclut des vampires. Il s’agit donc d’une goule qui, par le haut danger bactériologique qu’elle représente (elle devrait d’ailleurs porter un auto-collant Bio Hazard), est certainement responsable de nombreuses catastrophes à travers le monde.

Qui sait, notre monstre baillait-il tranquillement en direction du Titanic quand son barreur, affolé par le flux pestilentiel changea de cap brusquement et percuta un iceberg…

Je suis persuadé qu’à cause de son souffle corrosif, il lui est impossible de gonfler des ballons de baudruche sans que ceux-ci n’explosent et ne se liquéfient dans la seconde qui suit.

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Son bureau, comme je vous l’ai déjà décrit (je vous invite d'ailleurs à comparer les deux photos prises à plusieurs mois d'intervalles), représente une œuvre d’art. Des tours de 60 cm de haut constituées de piles de papiers divers, occupent 95% de la surface.

En hiver je n’ai pas eu l’opportunité d’en voir mais tout le reste de l’année, j’ai pu remarquer à plusieurs occasions des allées et venues de fourmis, provenant de je ne sais quelle zone interdite sous je ne sais quel imprimé datant de l’antiquité enfouis au cœur de l’édifice, à l’instar des archives de Gaston Lagaffe. On ne trouve aucun de ses insectes ailleurs dans la salle des profs ce qui me laisse penser qu’elles proviennent de lui… peut-être même de sous sa langue.

Si j’en crois ses élèves, il parait que sa voiture souffre du même agencement. Si ça se trouve, en fouillant un peu, on pourrait en sortir une boite de cassoulet entrouverte, une vieille glace à l’italienne transformée en un splendide champignon, un rat crevé, un doigt… Je n’ose imaginer une seconde sa maison. Mon dieu, c’est trop horrible.

Publié dans Ecoles

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