Une omelette pour tout le monde

Publié le par Ludo

Suite à l’article sur la risible mais inquiétante organisation religieuse dirigée par le charlatan habile au nom dont la consonance évoque immanquablement un lama régurgitant de la ratatouille, j’ai nommé Mickey Mouse Raël, l’un de vous m’a demandé s’il existait des lois anti-sectes au Japon.

Je l’ignore mais plusieurs anecdotes troublantes me laisse penser que si de telles lois existent, leur portée demeure bien trop inefficace.

Lorsque j’habitais à Osaka et que je sortais le soir avec des amis dans le but de donner en offrandes à mon estomac l’une des merveilles dont Osaka a le secret accompagnée de quelques litres de nectar, nous nous donnions souvent rendez-vous devant un écran de télévision géant, le Big Man, lui-même situé devant la gigantesque librairie Kinokuniya dans la gare du quartier d’Umeda. Véritable carrefour où s’entrecroisent différentes tribus, cet endroit donnait aussi la part belle aux excentriques de tout bord. Régulièrement je voyais des individus en aborder d’autres, et quand ceux-ci obtenaient une réponse positive, ils élevaient leur main à la hauteur du visage de leur interlocuteur pour leur présenter leur paume droite et restaient ainsi immobiles pendant une bonne minute, le tout dans un silence complet. Un jour, l’un d’eux me demanda même dans un parfait anglais (chose assez rare pour être signalée) : « Puis-je bénir votre âme ? ». Il s’agissait d’une jeune fille, vêtue assez sobrement mais sans que cela attire la curiosité. Je lui répondis avec toute la mesure dont je sais faire preuve en pareille situation qu’elle pouvait aller se faire cuire un œuf.

Un an plus tard, toujours dans cette bonne ville d’Osaka, je me rendis avec des amis au Sky Building, un gratte-ciel, accessible par un long tunnel piéton en ligne droite.

Au bout de celui-ci, un étranger, à première vue australien avec lunettes de soleil, short, T-shirt, sandales, sac-à-dos, cheveux roux sales et barbe épaisse me tomba dessus.

De particulièrement bonne humeur ce jour-là, j’acceptai d’entamer la causette.

Le barbu roux : « Hey salut ! »

Moi : « Hey salut ! »

Le barbu roux : « Vous venez d’où ?»

Moi : « De France, hey. »

Le barbu roux : « … … Dingue ! Je suis anglais ! »

Moi : « Ah super ! Un Européen ! »

Généralement la coutume entre étrangers veut que l’on parle à ce moment précis du motif de sa venue au Japon (boulot ou tourisme). L’inconnu prit alors des pincettes et je compris pourquoi quelques secondes plus tard.

Le barbu roux : « J’appartiens au mouvement de pensée Les Enfants de Dieu. Vous connaissez ? ».

Moi : « Ca me dit quelque chose. »

Il me tendit alors un prospectus et je reconnus alors le nom de la secte dont les membres avaient été inculpés en France pour attouchement sur les enfants.

Le barbu roux : « Bon on a eu quelques problèmes dans votre pays mais il ne faut pas croire tout ce qu’on dit. »

Moi : « Vous avez raison. Allez vous faire cuire un œuf. Au revoir.»

J’avoue ne pas avoir été mécontent de mon coup.

Il y a trois ans, je n’eus pas la répartie ni le temps de répondre à un autre étranger à Sakae. La quarantaine, habillé en costume noir, il m’aborda à la sortie d’une boutique d’aliments d’exportation en me demandant d’emblée si je croyais en Dieu.

J’eus le malheur de lui avouer mon athéisme et il ne me lâcha pas les semelles pendant dix minutes alors que je n’avais même pas pris la peine de m’arrêter. Parfaitement formé à tout débat, ce témoin de Jéhovah me sortait un passage de la Bible qu’il pointait d’ailleurs du doigt à partir de tout ce que je lui disais. Poussé à bout par ce pot de colle, je lui priais d’aller se faire cuire un œuf.

Image Hosted by ImageShack.us


A croire que j’attire ce genre de détraqués, je connus une expérience similaire à Harajuku, le quartier des fous de Tokyo, il y a deux ans. Fendant la foule, ce quinquagénaire à lunette, d’apparence américaine, boita dans notre direction en s’appuyant sur sa canne et nous tendit, après le discours d’usage sur nos provenances géographiques respectives, un dépliant qui décrivait les grandes lignes d’une secte millénariste qui voue un culte aux extra-terrestres (une concurrente du Mouvement Raëlien). Il alla, si j’ai bonne mémoire, se faire cuire un œuf.

Les autorités laissent donc tous ces cinglés faire comme bon leur semble. Rien d’étonnant à ce que la Sôgagakkai 創価学会, une secte exclue du bouddhisme mais qui prétend en faire partie, constitue l’une des écoles de pensée les plus puissantes au monde et dans l’archipel avec un parti politique, le Komeitou 公明党, et un quotidien, le Seikyô Shimbun tiré à 4.5 millions d’exemplaire.

A croire que personne n’a tiré les leçons de l’attentat au gaz sarin des fanatiques d’Aum dans le métro de Tokyo en 1995, une tragédie qui a pourtant prouvé que le manque de législation en la matière pouvait être dangereux…

Notre secte à nous, la Ouglerie, ne représente aucun danger comme en atteste ce cliché où figurent ses plus hauts dignitaires.

Publié dans Cas sociaux

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :