Stupeur et tremblements

Publié le par Ludo

Le Japon se situe à l’intersection de quatre plaques tectoniques et pourrait donc facilement revendiquer le titre de meilleur décolleur de pulpe du fond des bouteilles d’Orangina si ce breuvage était commercialisé ailleurs que dans les boutiques d’importation à un prix qui pousse justement à l’auto flagellation.

Les tremblotes terrestres font partie de l’inconscient collectif, cette chose informe que l’on appelle tantôt « les gens » tantôt « le quotidien ». Je ne tomberai pas dans la rédaction facile du cliché inspirant la paranoïa collective, cette chose informe que l’on appelle tantôt « mais que fait la police ? », tantôt « la connerie ». Ce phénomène naturel n’a pas lieu tous les jours et ne pousse pas les autochtones à porter un casque de chantier sous le bras à chacun de leurs déplacements (à l’exception des ouvriers de chantier justement).

Simplement, grâce aux exercices annuels dans les écoles et quelques campagnes de sensibilisation, les Nippons font sans doute preuve d’un peu plus de vigilance que les autres. On trouve dans quelques boutiques des nécessaires anti-catastrophe comprenant des lampes torches, des radios à dynamo, des aliments lyophilisés, des échelles en corde etc, mais dans la pratique, peu de gens en possèdent.

Beaucoup ne se soucient même pas du problème, jetant toute leur confiance sur la fiabilité de leur logement aux normes anti-sismiques. La situation a changé récemment suite à plusieurs scandales ébranlant (ahaha) le secteur : des architectes peu scrupuleux avaient utilisé des matériaux non conformes afin de réduire les coûts de construction et de récupérer la différence in the pocket au passage. Beaucoup d’autres logements ne résisteraient même pas à une secousse d’intensité moyenne. Nous reparlerons de ces derniers prochainement.

 

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Si en occident, on parle toujours d’échelle de Richter pour décrire une secousse, les Japonais vont plus loin en couplant à cette magnitude, divers degrés d’intensité. Cette mesure définit ainsi les effets ressentis dans les habitations. A partir d’une intensité de degré 3, on ressent les mouvements du sol (verticalement ou horizontalement) et les lampes bougent légèrement. Pour une intensité de 4, le choc s’accentue avec quelques déplacements d’objets et les lampes vacillent franchement. 3 et 4 demeurent les plus fréquents (en théorie puisque les 1 et 2 sont pour ainsi dire imperceptibles) quant à 5 et plus, ils laissent généralement des traces.

Il y a deux ans, trois séismes d’intensité 4 ont touché Nagoya (et d’autres villes du pays bien sûr). Le premier se produisit en écho à celui qui frappa le même jour Niigata avec un bilan grave. J’avais déjà connu quelques expériences sismiques dans le passé mais jamais à une telle ampleur. Ce qui me frappa d’abord fut la puissance du mouvement, à la fois horizontal et vertical, qui était sur le point de faire tomber ma PS2 sur l’étagère alors que la lampe bougeait comme un gamin turbulent sur une balançoire. Voyant que cela s’avérait sérieux, j’éteignis la télévision, j’ouvris la porte-fenêtre de mon balcon (où se trouve une trappe de sortie d’urgence) et celle des autres pièces sur mon passage vers le dessous de la table de la salle à manger où je me pliai en dix-huit. Cela dura bien une demi minute (beaucoup plus long que la normale), une éternité où je vivais chaque seconde d’attente avec angoisse. Je n’étais pas fier, c’est sûr, pendant que j’entendais les grincements des meubles et le claquement de la vaisselle dans le placard.

Le lendemain matin, cela se reproduisit dans la salle des profs du collège infernal mais seulement durant cinq secondes pour reprendre le soir à mon domicile, mais de manière plus douce.

D’après les experts, deux forts séismes risquent d’avoir lieu dans les cinquante prochaines années, l’un dans la région de Tokyo et l’autre dans celle de Toyohashi (à l’est de Nagoya dans la même préfecture). Le premier aurait 100% de chance de se produire contre 60% pour le second.

Avertis des risques nous sommes préparés au pire : une bonne réserve d’eau (48l), une lampe de poche, une trousse de secours, un couteau suisse, deux boites de confits de canard et de la moutarde de Meaux.

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Publié dans Ougl

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