La réunion fait la farce

Publié le par Ludo

Nous avions abordé dans cet article inoubliable ces réunions qui ont lieu imperturbablement vers 8h30 dans la salle des professeurs. Perte de temps totale, un chorei 朝礼 (meeting matinal) suit toujours le même schéma. Le responsable des professeurs dit bonjour, tout le monde lui répond, utilise trente secondes de parole pour signifier en fait qu’il n’a rien à dire et passe le relais aux responsables des classes pour qu’ils poursuivent une discussion plus ciblée en groupe. Pendant celle-ci, on passe trois minutes à parler du beau temps bien que parfois, j’avoue médire un peu, il arrive que l’on s’entretienne de problèmes logistiques sérieux (on a retrouvé l’éponge du tableau, elle était sous le bureau) ou des élèves (Toto a vomi en classe).

Tous les jours, des enseignants arrivent en retard au rendez-vous. L’ambiance formelle et stricte semble écraser de tout son poids les épaules du fautif quand celui-ci débarque dans la salle des profs. En effet, pour éviter de perdre trop la face, de se faire remarquer, de déranger ses collègues de sa présence ou d’obstruer leur champ visuel, le coupable se déplace à la manière d’un chat auquel on aurait fixé de la bande adhésive sur le dos (voir cette vidéo). Cette démarche à la Panthère Rose me fait toujours sourire.


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Un chorei ne signifie pas forcément dix minutes en l’air pour tout le monde. Certains n’hésitent pas à piquer un roupillon. Je ne comprendrai jamais cette tolérance vis-à-vis de ceux qui s’assoupissent de la sorte. Je ferme les yeux quand des rangées entières d’usagers dorment dans les transports en commun (littéralement je veux dire, je dors moi-même) mais quand cela se passe au travail, mon sang bout. Un collégien qui passe un cours entier à dormir sur son bureau avec une flaque de bave en guise d’oreiller ne sera quasiment jamais dérangé. Et quand il s’agit d’un prof, c’est la même chose, avec l’assurance ou la malice en plus.

Il existe ainsi plusieurs techniques :

1-     La science infuse : les yeux fermés, et le visage légèrement incliné vers le bas, on a l’impression que l’intéressé approuve les dires de l’orateur, reste bien au courant du sujet évoqué et attend la fin du discours pour faire part de ses idées.

2-     Le penseur : à l’aide d’une main et se tenant de profil par rapport à l’orateur, il cache ses yeux. Ce n’est qu’en se plaçant de face que l’on se rend compte de la supercherie.

3-     La migraine : comme le penseur, mais avec une main de chaque côté. Les experts de cette position effectuent de temps à autre des petits mouvements de massage des tempes pour tromper l’ennemi.

4-     La pendule : le somnolent n’en peut plus. Il veut dormir. Un semblant de conscience subsiste pour lui éviter de se fracasser le crâne sur le bureau quand celui-ci vacille avec trop d’amplitude. Ici il ne s’agit plus de se cacher.

5-     Le curare : le sujet écrase sec en restant assis sur sa chaise.

6-     La baudruche dégonflée : affalé sur le bureau, le dormeur assume totalement ses actes.

J’ai l’occasion de voir régulièrement des adultes dits responsables, utiliser sans scrupules les cinquièmes et sixièmes techniques. J’admets qu’à chaque fois que quelqu’un prend la parole, le faible volume de la voix ne rend pas le tout franchement audible, et donc captivant, mais de là à décider d’entamer une sieste… Choquant !

Curieusement, dormir, tout comme être saoul, font partie des choses que l’on accepte, alors que les retards, une apparence physique non conforme et autres banalités sont proscrites.

NB : en photo, le hall d’entrée de mon collège principal (interdit aux collégiens).

 

Publié dans Ecoles

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