Rirriput

Publié le par Ludo

Mesurer un mètre quatre-vingt-dix dans un pays où la taille moyenne culmine quinze centimètres plus bas représente un défi quotidien.

Avec les années, je suis parvenu à m’adapter aux sournoiseries architecturales de mon appartement et à dompter les pièges de cet environnement hostile. Tout ne se fit pas sans mal pour autant.

Le 17 décembre 2001, je terminais mon premier jour dans ma deuxième école primaire (je n’avais démarré que deux semaines auparavant et le système d’alors nous forçait à visiter une douzaine d’établissements par trimestre). Cette petite école de 180 élèves se situait à 20 minutes de bus et 30 de train. Se trouvant en pleine cambrousse au beau milieu des rizières, elle n’accueillait qu’un bus par heure. Le principal, plutôt flexible, m’avait autorisé à finir plus tôt. J’enfilai mes chaussures dans le genkan, après les avoir sorties de leur petit placard dont je ne pouvais fermer la porte en raison de leur longueur, ajustait mon sac en bandoulière et m’apprêtait à baisser la tête pour passer la porte. Comme il s’agissait de mon premier trajet en sens inverse, j’ignorais le temps nécessaire pour rejoindre l’arrêt et décidait donc de me dépêcher. C’est donc en courant, plié en deux, que je franchis l’entrée. Un flash se produisit. Sans trop comprendre ce qu’il m’était arrivé, je me trouvais le postérieur et le bras gauche à terre. Un coup d’œil à la porte me suffit pour me rendre compte que celle-ci demeurait exagérément plus basse que la moyenne. Je sortis en courant, en tentant d’oublier la douleur apparue dans le bras. Songeant soudainement que le choc m’avait peut-être complètement décoiffé, je passai ma main dans les cheveux. Quand je la retirai, je remarquai avec effroi qu’elle était baignée de sang. N’ayant ressenti aucune douleur à la tête, je fus pris d’un dilemme : dois-je continuer ma route et me soigner tout seul ou rebrousser chemin et demander un désinfectant ? Devant le sérieux de l’hémorragie, je décidai finalement de revenir à l’école. La blessure fut plus sérieuse que je le pensais puisqu’on m’emmena à l’hôpital pour un point de suture. Je dus porter un filet ridicule sur le crâne pendant cinq jours.

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Lorsque je me déplace dans un métro bondé, j’apprécie de me trouver au-dessus des autres et de respirer une poche d’air que personne ne peut normalement atteindre. En revanche je déteste les publicités situées dans les allées, qui m’arrivent en plein visage. Je dois toujours jongler entre deux positions délicates, poster sur la joue droite ou la joue gauche.

Je ne supporte pas non plus de devoir m’incliner lorsque les portes s’ouvrent. Dans le Meitetsu, j’oublie toujours la présence d’une barre en fer, légèrement plus basse que la hauteur des portes situées derrière. Je me baisse ainsi toujours pour sortir mais pas assez pour éviter cette satanée barre et provoquer l’hilarité camouflée des usagers encore présents dans le wagon.

Enfin je suis toujours gêné de souiller par mégarde le haut des urinoirs quand je tente de soulager une envie pressante. Le sommet du bloc de faïence m’arrive pile en dessous des deux voisines du fautif et la zone inondable se situe 15 centimètres plus bas. 15 centimètres… Forcément.

Publié dans Ougl

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